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De la tête aux pieds
20 avril 2014

L’intégration des activités corporelles impressionnistes en éducation physique et sportive

 

Qu’est-ce ? Quelle est cette chose surnaturelle, insondable et sans nom ? Qui est le seigneur et maître caché, cruel, impitoyable qui use d’artifices pour m’amener à lui obéir ? Tant et si bien que contre toute nostalgie et tout amour humain, je me fasse violence et me pousse, me presse et me rendant prêt à faire ce que mon propre cœur, mon cœur humain n’oserait même envisager ? Achab est-il Achab ? Est-ce moi, Seigneur ou qui d’autre qui lève ce bras ? Mais si le grand soleil lui-même ne se meut pas de lui-même, s’il n’est qu’un messager dans le ciel, s’il n’est point une seule étoile pour accomplir sa révolution sans une invisible puissance, comment ce cœur chétif battrait-il, ce cerveau débile penserait-il, si Dieu n’en est point le battement, la pensée et la vie et non moi.

Herman Melville, Moby Dick, Flammarion (p.542).

Introduction

L’objet de notre communication concerne la place des activités corporelles impressionnistes au sein de l’EPS. Nous voudrions montrer qu’il existe une certaine indifférence voire un hermétisme des professeurs d’EPS à l’égard de ces activités privilégiant exclusivement les activités corporelles expressionnistes. Cette idée est le fruit d’une analyse des articles d’une revue professionnelle bimestrielle, la revue EPS que nous avons étudiée sur une période de 17 ans. Nous avons recensé tous les articles concernant les ACI et nous avons questionné le contenu des articles.

Pour démontrer notre thèse, nous mettrons en évidence le faible nombre d’articles qui ont été publié au cours de cette période. Ensuite nous montrerons que les comptes rendus d’expériences montrent que les ACI restent aux portes de l’école et de l’EPS. Les textes officiels organisant la discipline venant renforcer notre propos. Nous essaierons d’expliquer ce phénomène en montrant que ces expériences mettent en évidence une pédagogie qui va à contre courant de la pédagogie traditionnelle. Enfin nous clôturerons notre propos en montrant tout l’intérêt pour l’éducation physique des jeunes l’apport de ces disciplines.

                                                 *              *               *

 

Avant toute chose, il nous faut définir ce que nous entendons par ACI et ACE :

Les ACI regroupent les activités comme le yoga, la relaxation, l’eutonie, le taï-chi-chuan. Elles amènent le sujet à sentir son corps, à bien s’y sentir, à se mettre en présence. Pour cela, l’immobilité voire la lenteur est recherchée. Une importance est accordée à la respiration en lui donnant son libre cours et à l’amplifier sans rythme et en utilisant l’expiration pour supprimer les tensions musculaires. La souplesse et la libération des tensions conscientes ou inconscientes sont au centre des préoccupations. Le sujet va s’intérioriser et couper momentanément ses relations expressives avec autrui. Ces activités comprennent un ensemble de mouvements ou de postures très codifiés dont l’enseignement passe par un maître.

Les ACE correspondent aux activités où le mouvement a une fonction médiatrice avec le monde extérieur, qu’il soit physique ou humain. Nous retrouvons là l’ensemble des sports, les danses et les activités de cirque. Le mouvement est le produit d’une intentionnalité et cherche une forme d’efficacité. De ce fait, ces activités orientent la présence du sujet vers l’extérieur. A première vue, la centration sur le corps pourrait s’avérer une gageure. Si je pense à mon poignet pendant que je tape sur un clou avec mon marteau, il est fort à parier que je risque d’avoir du mal à accrocher un tableau au mur. Le sentir son corps pendant l’action peut amener à une inefficacité.

A-Un hermétisme aux ACI

1-bilan

Cependant, on  ne trouve que très peu d’articles qui font référence aux ACI instituées (Yoga, Eutonie, taï-chi-chuan, relaxation…) :

  • Eutonie : 3

Revue

articles

auteurs

revue EPS 266 juillet Aout 1997

 

l’eutonie dans la préparation d’athlètes. Canoë kayak

 

René Bertrand

« Eutoniste », élève de G. Alexander.

Besançon.

Anne Boixel

Vice championne du monde. Canoë-kayak slalom en 1993 et 1995. Sélectionnée olympique 1996.

Pierre Salamé

Entraîneur national de canoë-kayak slalom.

revue EPS 289  Mai-Juin 2001

 

Eutonie : rôle et place en EPS

 

Bernard Paris

IPR EPS honoraire.

Revue EPS 323 Janvier février 2007

 

UNE APPROCHE DE

L'EUTONIE EN EPS

Danielle Escala

Professeur d'EPS,

Lycée polyvalent

Gaillac (81).

Agnès Pernet

Professeur d'EPS,

Paris (75).

 

  • Yoga : 3

 

Revue EP.S n°277 Mai-Juin 1999

LE YOGA DANS UN

SYSTÈME D'ÉDUCATION

INTÉGRALE

Micheline Flak

Présidente de l'association RYE*.

 

Ajit Sarkar

Centre de ressources sur

la condition physique.

Département de la recherche INSEP.

revue EPS n°344 novembre décembre 2010

Une situation une démarche

Yoga : s’échauffer autrement

Dominique Daumail professeur agrégé d’EPS lycée Pissarro, Pontoise (95)

Revue EPS n°356 2013

Yoga et accompagnement personnalisé au lycée

Dominique Daumail professeur agrégé d’EPS, diplômée du RYE-France, lycée Pissarro, Pontoise (95) dominique.daumail@wanadoo.fr

 

  • Tai chi chuan : 1

Revue EP.S n°264 Mars-Avril 1997

Le tai-chi-chuan

PROFESSEUR MEN HUI FENG directeur du département de « wushu » de l’université de Pékin

E. CAULIER professeur invité de Tai-chi-chuan de Louvain.

P. ANDRIAMAMPIANINA

 professeur d'EPS au lycée-collège A. Chatelet à Douai.

 

  • Relaxation /stretching : 7

 

revue EPS 269 janvier février 1998

Le stretching postural

Jean le Bivic masseur kinésithérapeute 91 brunoy

Revue EP.S n°309 Septembre-Octobre 2004

DE LA RELATION SINGULIÈRE AU GROUPE

Stéphane Geay

Professeur d'EPS,

Collège Roger Martin du Gard,

Épinay-sur-Seine (93).

EP.S № 324 - MARS-AVRIL 2007

Relaxation : PASSER D'UN

« ÉTAT DE CORPS » à un autre

Régis Galek

Professeur d'EPS,

Cité scolaire de Briey (54).

Revue EPS n° 335 janvier février 2009

Techniques de détente : connexion entre membres inférieurs et bassin

Nicole Guerber Walsh

Professeur de danse

UFR STAPS, Paris-Sud XI, Orsay

Geneviève Progent

Professeur d'EPS honoraire

Revue EPS n°309 septembre –octobre 2004

Préparation corporelle en contact avec le sol

Geneviève Progent revue EPS

Revue EPS n° 352 mai juin juillet 2012

Réveiller sa musculature profonde stretching postural

Emmanuelle-Claire Lefèbre

Enseignante licenciée école de stretching postural

Revue EPS n° 339 novembre décembre 2009

Des clés posturales pour mieux flotter

Isabelle Fantinutti professeur D’EPS collège le chamandier Gières (38) BE2 de natation sportive

 

  • Préparation mentale : 4

Nous avons retenu ces types d’articles parce qu’à leur lecture, les auteurs proposent dans leur procédures didactiques l’utilisation des ACI.

Revue EPS n°303

L’ENTRAINEMENT MENTAL  en escalade

Olivier guidi CTR PACA entraîneur Pôle France escalade FFME creps Aix en Provence

Revue EPS n°304

A propos de la préparation mentale

Christian Target

Revue EP.S n°310 Novembre-Décembre 2004

PREPARATION MENTALE : UNE STRATÉGIE CONTRE

LE « DECROCHAGE SCOLAIRE »

 

Alain Fouchet Professeur d'EPS, Collège Montaigne, Dompaire (88).

 

Revue EPS n° 350 janvier Février 2012

Préparation mentale poursuivre des objectifs du lycée à l’université

FabienStange professeur agrégé d’EPS, BE2 de tennis

 

On trouve donc 19 articles en 15 années de publication de la Revue EPS (90 numéros), soit 13 articles sur 1000 articles environ. On peut donc dire qu’environ 1% des articles de la Revue EPS sont consacrés aux ACI.

2- Les types d’articles

Nous avons repérer deux types d’articles didactiques utilisant explicitement les ACI dans la revue EPS de 1997 à nos jours. Il y a des procédures didactiques les utilisant comme une préparation à la pratique des ACE et d’autres comme un moyen de combattre les problèmes de l’école.

A-les ACI propédeutiques aux ACE

Nous avons trouvé des articles qui défendaient la pratique des ACI dans la perspective d’une pratique plus efficace des ACE. Si on étudie les articles de la revue EPS d’avant la période qui nous intéresse, nous constatons que cela a toujours été le cas. Les ACI sont envisagées avec la même intentionnalité pédagogique. En quoi ? Qu’apporte la pratique des ACI à la pratique des ACE ?

- mettre de la passivité dans l’activité en se libérant de ses tensions musculaires en prenant conscience de son corps vivant.

- savoir sentir son corps pour apprendre :          du non senti des consignes au sentir.

                                                                                              Sentir pour ressentir pour remédier.

« Apprendre la précision du geste juste, efficient et efficace. » Revue EPS n°344 novembre décembre 2010

« C’est sur ce dernier point que nous viserons le développement de compétences centrées sur le contrôle de soi et le relâchement pour accompagner la recherche d’efficacité dans d’autres APSA. » Revue EPS n°344 novembre décembre 2010

« L’objectif est les mettre dans un climat de disponibilité, de lucidité et de vigilance facilitant l’optimisation de la performance. »  Revue EP.S n°277 Mai-Juin 1999

«  Nous pouvons être dans l’attitude du yoga si nous ne transgressons pas les règles de l’olympisme et les pensées de Pierre de Coubertin. » Revue EP.S n°277 Mai-Juin 1999

« L’eutonie peut jouer un rôle intéressant chez les sportifs en leur permettant d’enrichir le clavier tonique sur lequel ils jouent. » revue EPS 289  Mai-Juin 2001

 

B- les ACI comme un remède aux problèmes de l’école, elles s’inscrivent dans une véritable thérapeutique scolaire

Ici, et c’est là qu’on peut noter une évolution des considérations didactiques, les ACI sont utilisées pour lutter contre les désordres scolaires. Il y a eu certes des propositions qui justifiaient la pratique des ACI dans une perspective de lutte contre l’échec scolaire mais elles restaient cantonnées au niveau des déclarations d’intention. Alors qu’ici elles s’inscrivent dans de véritables protocoles pour la plupart. Elles sont utilisées pour résoudre trois natures de problématiques :

- l’échec scolaire et le rapport aux savoirs : développer l’attention et la concentration : libérer et contrôler son attention. Devenir disponible et en accueil de la connaissance des consignes.

-« une certaine idée du yoga comme moyen de développer l’attention et la concentration que ce soit en classe ou comme on dit en EPS sur le terrain. Ils pensent dès le départ que le yoga va développer l’ambiance des cours et leur permettre d’exercer leur métier avec une efficacité accrue. » Revue EP.S n°277 Mai-Juin 1999

« Ainsi les travaux du RYE (recherche du Yoga à l’école) montrent que les élèves en difficulté scolaire respirent souvent mal, manquent de concentration, mémorisent difficilement et ont aussi régulièrement mal au dos. » Revue EPS n°344 novembre décembre 2010

 « A repérer les voies dans lesquelles les lycéens seraient à même de réussir et de prendre confiance en eux. »Revue EPS n°356 mars-avril-mai 2013

« Le développement des capacités à se concentrer, à être attentif….le développement des capacités à mémoriser …Se mettre en situation d’écoute des consignes…se mettre en état d’accueillir de nouvelles connaissances…Augmenter la puissance de travail.» Revue EPS n°356 mars-avril-mai 2013

Discussion

L’utilisation des ACI s’inscrit dans une perspective de rééducation cognitive. Il s’agit d’amener l’élève à contrôler son attention et sa concentration qui sont les conditions élémentaires pour que l’enseignant puisse faire passer son enseignement. On veut amener le sujet à pouvoir accueillir et être disponible au savoir. En déplaçant l’attention sur l’ensemble des espaces corporels, le sujet va pouvoir reprendre le contrôle de son activité cognitive. En outre, en m’intériorisant, je nais au sens de l’altérité du monde qui donne envie de le connaître.

 

- la violence et les incivilités : développer l’empathie par l’éducation au se sentir, au se connaître et au se comprendre.

« La dimension éthique semble intéressante à exploiter dans les collèges où l’on est souvent amené à travailler sur le respect des règles, de l’autre… » Dans la Revue EP.S n°264 Mars-Avril 1997 : le tai-chi-chuan

-« la maîtrise des sensations corporelles autant que l’observation des représentations négatives s’impose comme un pas décisif dans le sens d’une éducation authentique. Celle-ci amène à la tolérance, au respect de soi et de l’autre. A ce niveau pourquoi ne pas parler que l’accès à la citoyenneté passe par une meilleure connaissance de soi ? » Revue EP.S n°277 Mai-Juin 1999

« Le niveau de violence est diminué lorsque se réduit le décalage entre l’image corporelle idéale et celle que vit le jeune en difficulté psychologique. »    Revue EPS 289  Mai-Juin 2001

« Permettre à l’élève de rendre son esprit vide pour accueillir l’autre…Vivre ensemble.» Revue EPS n°356 mars-avril-mai 2013

Discussion :

Les ACI sont utilisées contre les phénomènes de violence et d’incivilité dans les enceintes scolaires. Elles s’inscrivent dans une éducation à l’empathie. En me découvrant dans mes sentis corporels, je peux considérer qu’autrui aussi est comme moi, qu’il a un corps qu’il sent. Ainsi, je nais au souci de le respecter. La violence provient souvent d’une inconscience de l’autre, l’autre étant un faire valoir. En le réduisant au silence, j’ai le sentiment de naître à moi-même. Je résous mon sentiment d’humiliation que la présence et l’existence d’autrui créent. Mais en sentant mon corps, en m’intériorisant, je crée une distance avec autrui et le monde extérieur. En naissant à moi-même grâce à mon corps, je nais à autrui.

 

- le stress : le contact avec son propre corps permet de s’inscrire dans l’ici et le maintenant et d’échapper à la norme, d’emprunter un chemin personnel. Il s’agit de retrouver bien être et confiance en soi.

 « Au départ, c'était surtout une technique pour mieux gérer le stress d'un compétiteur. » Dans la Revue EP.S n°264 Mars-Avril 1997 : le tai-chi-chuan

 « Il s'agit de lutter efficacement contre les problèmes liés au stress : tensions physiques, psychiques, insomnies… » Revue EPS n°277 Mai-juin 1999

« Pour apporter des connaissances transversales au bien être » Revue EPS n°344 novembre décembre 2010

Discussion :

L’école, espace normatif où on demande à un élève de se conformer à des attentes, à des savoirs, à des savoirs êtres. On attend de lui des performances des attitudes. Cette perspective l’amène à s’oublier, à être toujours au-delà de lui-même. Cela génère une situation de peur de ne pas pouvoir faire face.

En outre, l’évaluation permanente et les risques liés à l’échec participent au climat anxiogène qui habite la conscience de l’élève. Il est toujours pris par cet avenir qui l’attend telle une faucheuse.

Enfin cette avenir est toujours hasardeux, il est placé en situation de contingence : que va-t-il m’arriver ? Je ne décide pas de mon avenir.

Or avec les ACI, on s’immerge dans l’ici et le maintenant, dans son corps propre sans référence à une norme. Par ce lieu qu’est le corps, j’échappe à la normativité et je retrouve les racines de mon pouvoir. J’accède à une forme de sécurité par l’intériorité.

                                                            *    *   *

Ces articles s’inscrivent d’une part dans des procédures éducatives spécifiques en marge de l’emploi du temps normal : accompagnement personnalisé au lycée, accompagnement éducatif au collège, création d’une voie éducative parallèle…et d’autre part en amont et en aval des apprentissages des ACE pendant les cours normaux d’EPS. Les ACI ne sont pas une partie intégrante des cours normaux d’EPS. Cet aspect renforce notre idée de l’hermétisme de l’EPS à l’égard des ACI. Chose que Geneviève Cogérino reconnaissait déjà en 1993 dans un article de la revue EPS n°239 : « les relaxations en EPS ».  Elle dit : « la relaxation, l’eutonie sont peu présentes en éducation physique car absentes des programmes explicites de l’éducation physique. Peu considérées par beaucoup d’enseignants qui n’y perçoivent qu’une occasion de s’écouter sans se confronter à la dure loi de l’efficacité, inquiétants quelques autres par les réactions de rejet ou de dérision par les élèves, elles n’entrent pas dans les formations initiales des enseignants. »

 

2 Les textes officiels en EPS

On pourrait nous opposer l’argument suivant que ce phénomène d’hermétisme est davantage le fait de la ligne éditoriale de la revue. Si tel était le cas on peut se demander pourquoi il y en a néanmoins. On peut imaginer que malgré tout les expériences sont trop sporadiques.

La relative indifférence des programmes à l’égard des ACI vient renforcer notre propos.

Les programmes du collège issus du B.O n°6 du 28 aout 2008 ne font pas référence aux ACI : elles ne font pas partie du socle commun.

Référentiel national issu des APSA réparties selon 4 compétences culturelles

 

Compétence culturelle

activités

CP1 : Réaliser une performance motrice maximale mesurable à une échéance donnée

Demi-fond

Haies Hauteur Javelot Multi bond Relais vitesse Natation longue Natation de vitesse

 

CP2 : Se déplacer en s’adaptant à des environnements variés et incertains

Canoë Kayak Course d’orientation

Escalade

CP3 : Réaliser une prestation corporelle à visée artistique ou acrobatique

Aérobic Acrosport Gymnastique sportive Gymnastique rythmique Arts du cirque Danse

CP4 : Conduire et maîtriser un affrontement individuel ou collectif

Basket Football Handball Rugby Volley-ball Badminton Tennis de table Boxe française Lutte

 

Nous pouvons constater qu’il ne s’agit que d’ACE.

 

Les programmes du lycée de 2010 ne font aussi pas référence aux ACI dans les compétences propres à l’EPS.

Liste nationale d’activités physiques, sportives et artistiques

Bulletin officiel spécial n° 4 du 29 avril 2010

Compétence culturelle

activités

CP1 : Réaliser une performance motrice maximale mesurable à une échéance donnée

Course de ½ fond, course de haies, course de relais-vitesse, lancer du disque, lancer de javelot, saut en hauteur, pentabond, natation de vitesse, natation de distance

 

CP2 : Se déplacer en s’adaptant à des environnements variés et incertains

Escalade, course d’orientation,

natation sauvetage.

CP3 : Réaliser une prestation corporelle à visée artistique ou acrobatique

Acrosport, aérobic, arts du cirque, danse, gymnastique (sol, parallèles, asymétriques, fixe, poutre), gymnastique rythmique.

 

CP4 : Conduire et maîtriser un affrontement individuel ou collectif

Basket-ball, football, handball, rugby, volley-ball, badminton, tennis de table, boxe française, judo.

 

CP5 : réaliser et orienter son activité physique en vue du développement et de l’entretien de soi

Course en durée, musculation,

natation en durée, step

 

Néanmoins, il y est fait référence dans les documents d’accompagnement du lycée. On parle des disciplines orientales de relaxation, de stretching. Il y a d’ailleurs un curriculum de connaissances assez dense. Mais il y est spécifié que ces activités ne peuvent pas être le cœur d’une séance d’EPS.  .  Ces activités sont  propédeutiques aux ACE ou permettent une meilleure récupération : « La séquence dure environ un quart d’heure. »…« La séquence dure de dix à quinze minutes. »…« La mémorisation par l’élève des procédures employées par l’enseignant pour guider le relâchement est indispensable pour permettre aux élèves l’accès à la compétence du niveau 1 du cycle terminal ; Elle suppose que l’enseignant inclut ces activités régulièrement et systématiquement dans ses séances. Cette régularité peut consister à garder à chaque séance un moment spécifique (atelier particulier ou fin de séance) ou à consacrer un ensemble de séances courtes à ces activités. (Un cycle associant course de longue durée puis relaxation ou musculation et relaxation par exemple) ».

 Il n’y a aucun caractère obligatoire. Cela reste à la discrétion du professeur. Sans formation avec 30 adolescents et 2 heures de cours par semaine…

 Il est inenvisageable d’évaluer les bacheliers sur un cycle de Yoga. Les textes ne le prévoient pas. Cela irait même à l’encontre du but recherché à savoir l’intériorisation. Une évaluation amènerait les sujets à se conformer à des normes et donc à s’extérioriser. Les ACI perdraient leur âme.

Un inspecteur venu m’inspecter en 2010 m’a indiqué que dans ma programmation, le cycle : «  gestion mentale de la motricité » ne pouvait figurer dans le programme des APSA de cette classe de 5ème.

Conclusion :

Nous pouvons ainsi considérer que les ACI restent aux portes de l’EPS et de l’école. Il existe une forme d’hermétisme à l’égard de ces activités qui cherchent à amener les élèves à se mettre au contact de leur corps, de le sentir, de prendre conscience de cette vie qui les habite, de ce corps passif, de ce corps qui les porte, lieu de leur origine.

B Causalités de l’hermétisme scolaire

Ne peut-on pas trouver dans les contenus de ces articles les raisons de cet hermétisme ?  N’y a-t-il pas une opposition entre la pédagogie des ACI et celle des ACE, pratiques corporelles exclusives de l’EPS ?

 

1-la liberté ou l’obéissance

Dans les articles, il est fait référence à la liberté des élèves de participer ou non à ces activités, d’interrompre à loisir d’une activité. Chose impensable dans une école gratuite, laïque et obligatoire, lieu de devoir, où l’élève doit se soumettre à un emploi du temps, à un programme décidé sans lui, il est contraint au silence et à l’immobilité en classe. Il doit respecter un règlement intérieur, doit s’acquitter d’un travail à faire, doit apprendre des leçons.

-Les ACI suppose peut être la liberté car la précision des gestes et des postures à reproduire peuvent donner le sentiment de se soumettre si l’élève n’adhère pas au départ au projet de l’activité ce qui peut être le cas chez des jeunes qui ont souvent de fortes motivations pour les ACE.

-En outre, l’orientation de l‘attention sur le corps ne peut pas être contraint puisque cela ne peut pas être évalué. Aussi il faut user de conviction et donner à l’élève le sentiment de son autodétermination et ne pas repousser l’élève par  une attitude pédagogique injonctive et contraignante.

Enfin une la relation pédagogique non directive, chaleureuse et détendue avec une écoute réciproque entre deux personnes est privilégiée alors que traditionnellement les relations sont conçues selon une structure de domination et de soumission. L’école est le plus souvent le lieu de l’obéissance et de la discipline ; la liberté de l’élève fait peur.

-« J’ai une petite expérience en collège et en lycée et il me semble bien difficile d’envisager un cycle de tai-chi chuan avec un public non volontaire. »  Dans la Revue EP.S n°264 Mars-Avril 1997 : le tai-chi-chuan

« Le yoga a pour objet de développer l’esprit critique et la faculté de penser par soi-même…Le yoga nous enseigne tout d’abord le discernement et la liberté. » revue EPS n°277 mai-juin 1999

 « En revanche, il y a accord sur quelques principes pédagogiques : non directivité, neutralité bienveillante, qualité d’écoute, respect inconditionnel des pratiquants. »  Revue EPS 289  Mai-Juin 2001

« Les trois cycles suivants sont organisés sous formes d’ateliers auxquels les élèves s’inscrivent, le volontariat faisant partie de la stratégie de réussite. » Revue EPS n°356 mars-avril-mai 2013

« Si j’ai pu constater une attente chez certains, un intérêt pour d’autres, je dois dire que le comportement opposé de deux ou trois élèves, voire même un seul, suffit parfois à rendre impossible ce travail. » revue EPS 289  Mai-Juin 2001

« Un certain nombre de conditions favorables à cet enseignement doivent être réunies, notamment celle relatives aux motivations des élèves qui sont le plus enclins à comprendre et à désirer des activités sportives ludiques et techniquement modélisées. Sauf cas particulier la culture des jeunes d’aujourd’hui est sportive. Sans réel talent pédagogique, fait de connaissance personnelle de l’eutonie et de conviction certaine quand à son intérêt en EPS, il est quasiment impossible de donner, une réelle place à cet enseignement. »   Revue EPS 289  Mai-Juin 2001

 2-Auto-évaluation par le témoignage ou évaluation objectivante

Dans les articles, il est demandé aux élèves de témoigner de leur vécu des séances. Il n’y a personne pour les évaluer. Cela pourrait être fait à partir des postures mais là les disciplines impressionnistes deviendraient expressionnistes. L’évaluation deviendrait objectivante alors que la fonction de ces disciplines est de permettre à une personne d’accéder à sa subjectivité. Il n’est pas possible d’évaluer une impression alors que l’évaluation est le moyen par lequel l’institution tient les élèves.  L’évaluation qui objective l’élève est partout à l’école. Elle est un moyen qui rassure, elle est un moyen de pouvoir. Cela est d’autant plus fort dans le champ de l’EPS où l’évaluation est l’outil central de la didactique qui a lui a permis de gagner ses galons de discipline d’enseignement et de gagner en respectabilité.

« La fin du cours ou du cycle est un instant de partage des idées. Chacun doit parler de lui, ce qui pour des jeunes adolescents, n’est pas toujours facile. » Revue EPS n°356 mars-avril-mai 2013

 

3-Socialisation : développement de soi ou la compétition

« Quand on n’est pas disponible pour soi, on ne peut pas l’être à l’égard d’autrui. » Antoine de la Garanderie dans « apprendre sans peur » page 59, chronique sociale 1999

Certains auteurs rejettent la compétition et recherchent à ce que la personne qu’ils accompagnent, ait une démarche de cheminement. La socialisation est soi considéré comme l’aboutissement du développement de soi dans un cadre d’entraide. Alors qu’à l’école, la compétition et l’émulation structurent le sens des disciplines.

 

« Cela correspond à un désir de sortir des pratiques de compétition ». Dans la Revue EP.S n°264 Mars-Avril 1997 : le tai-chi-chuan

« A deux, c'est vraiment l'esprit de collaboration, il n'y a pas du tout d'affrontement. Dans la langue chinois, on dit combattre « avec » quelqu’un et non pas « contre » quelqu’un. » EP.S n°264 Mars-Avril 1997 : le tai-chi-chuan

« Sans lutte(…) contre les autres » Revue EPS n°344 novembre décembre 2010

«  La philosophie pour ne pas dire l’idéologie qui sous tend le courant eutoniste porteur de la pensée de Gerda Alexander rejette la compétition sportive car elle est source de malmenage corporel et facteur de discrimination entre les pratiquants. » revue EPS 289  Mai-Juin 2001

« Nous sommes aux antipodes de la conception du conseil pédagogique et scientifique de la FSGT d’obédience marxiste qui au début des années 1970, proposait une classification des APS dans laquelle l’eutonie était considérée comme le degré zéro de la communication. » revue EPS 289  Mai-Juin 2001

 

4-un corps hérité théâtre de mon irresponsabilité ou un corps outil de ma responsabilité

Les ACI amènent la personne à sentir la présence de son corps, de ses structures qui sont là. Elles s’adressent au corps vivant de la personne, un corps dont il a hérité, un corps dont il n’est pas l’auteur, un corps lieu de son irresponsabilité. Alors que les ACE en EPS cherchent à favoriser la maîtrise d’un corps outil de ma responsabilité, vecteur de ma volonté, et  à découvrir son pouvoir être du corps. En reprenant une distinction d’Antoine de la Garanderie critique de la raison pédagogique 1997), Il y a d’un côté une discipline, les ACI qui amène le sujet à promouvoir le statut de témoin dans le sentir et une autre, les ACE qui amène le sujet à promouvoir le statut d’acteur dans le faire. Un corps senti ou un corps agi…est-ce inconciliable ?

 « Leur motivationest davantage de pratiquer une discipline de bien être. »    Dans la Revue EP.S n°264 Mars-Avril 1997 : le tai-chi-chuan

 

« Les mouvements doivent être clairs pour ne pas mettre en péril la santé du pratiquant. L’expert en Tai-chi-chuan doit donc bien connaître le corps. Il doit comprendre l’anatomie, la biologie la physiologie. »  EP.S n°264 Mars-Avril 1997 : le tai-chi-chuan

 « En revanche, il y a un accord pour considérer que la douceur est une des caractéristiques essentielles de l’eutonie puisqu’elle exclue tout ce qui peut être violence faite au pratiquant. »  Revue EPS 289  Mai-Juin 2001

Recherche d’agir sur son corps vivant : effet des postures sur les fonctions digestives respiratoires, circulatoires et posturales. Revue EPS n°344 novembre décembre 2010

 

5-Formation des professeurs :

Dans les articles, il est fait souvent référence à la nécessité de la formation des enseignants. Une formatrice du RYE (recherche en YOGA dans l’éducation) à qui je demandais comment elle expliquait la faiblesse de la présence du yoga à l’école, elle avançait cette idée de l’absence de formation des enseignants que l’on retrouve dans les plaquettes de formation des UFR STAPS.

Sans réel talent pédagogique, fait de connaissance personnelle de l’eutonie et de conviction certaine quand à son intérêt en EPS, il est quasiment impossible de donner, une réelle place à cet enseignement. »   Revue EPS 289  Mai-Juin 2001

-« la condition sine qua non pour enseigner l'eutonie. Y compris en milieu scolaire, est d’avoir une bonne connaissance pratique personnelle. »   Revue EPS 289 Mai-Juin 2001

 

C l’avenir pourquoi ne pas introduire les ACI, pourquoi ne pas leur donner une place pleine et entière ? Les ACI n’ont-elles pas une valeur éducative indépendante des ACE ?

1-Plan ontologique et de l’éducation générale

En naissant à son corps propre à son corps vivant, le sujet peut accéder à l’éthique et échapper à une morale aliénante. Je nais au sens du bon et du mauvais pour moi. Et donc je nais :

-à ma liberté de dire oui ou non aux injonctions extérieures. La liberté est pour nous l’alpha et l’oméga du processus éducatif.

-au souci de moi. Mon corps est le lieu de mon bien être qui est dépendant de soin que je saurai lui apporter. Ainsi j’accède au sens l’hygiène corporelle

-à mes capacités réflexives, à ma capacité à me réfléchir en prenant une distance par rapport à mon corps, à cet espace dont je ne suis pas l’auteur, à cet autre qu’est mon corps. Je peux naître à l’herméneutique et au sens de la culture car cette réflexion me fait émerger au vécu d’altérité du monde qui m’entoure.

-à l’altérité par une éducation à l’empathie que peut favoriser la rencontre avec ses propres sentis.

2-Plan de l’éducation physique et sportive

L’accession au senti du corps propre peut favoriser les conduites motrices et leur apprentissage

-sentir pour mobiliser :

*équilibrer la passivité et l’activité dans la conduite d’un mouvement

*le pouvoir volontaire sur le corps dépend de son senti

-ressentir pour remédier à l’échec et reproduire la réussite

-pressentir pour reproduire

-consentir pour développer. Il s’agit d’accepter les lois naturelles du corps dans la conduite de la volonté.

 

Conclusion

Dans apprendre sans peur Antoine de la Garanderie nous dit dans  « apprendre sans peur »  aux éditions chronique sociale (1999) à la page 60 : « Se dépasser et s’assumer ne doivent pas être confondus. Certains excellent à aller au-delà d’eux-mêmes mais avant de s’être pris en charge. Ils restent à la traîne de leur progrès. D’autres se prennent bien charge mais n’avance pas d’un poil. Les premiers ne parviennent pas à se rejoindre. Les seconds à se quitter. »

Sans vouloir remettre tout en question, nous voudrions relativiser notre propos. Peut être que tous les élèves n’ont pas besoin des ACI mais plutôt d’ACE. Certains ont besoin de sortir d’eux-mêmes alors que d’autres ont besoin de s’intérioriser. Comment faire sur le plan didactique ? Dans cette perspective peut-on faire une systématique de l’EPS ?  Nous pensons que tout est affaire d’intention pédagogique. Pour un même outil on peut poursuivre des objectifs différents. Tout dépend de la pédagogie. Ainsi, on peut utiliser la pédagogie des ACI au sein des ACE et vis versa. Une pratiquante de notre connaissance nous disait qu’elle vivait le yoga différemment suivant le professeur : soit de façon normative et externe à elle-même, soit plus respectueuse de son corps et intériorisée. De même, on peut se demander si Roger Fédérer ne fait pas du Yoga en faisant du tennis et Zidane en jouant au football ?

 

 

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