La compétition humaniste (1ère partie)
Finale du tournoi de Bercy 1992 : Boris Becker bat Guy Forget tenant du titre
Boris Becker vient de battre Guy Forget à l’Open de Tennis de Paris Bercy en 1992. L’année précédente, le vaincu était le vainqueur. Ce qui me marque dans cette photo, c’est le regard que porte le Français sur l’Allemand qui vient de décrocher son troisième titre dans la capitale française. Il semble sincèrement admiratif de son adversaire. On sent l’admiration, la reconnaissance de la supériorité qu’il a dû ressentir au cours du match. Il ne paraît ni affecté ni déçu par sa défaite. La victoire était en dehors de ses possibilités. Le fait d’avoir tout donné et d’en avoir eu le sentiment permet d’accepter le sort d’une compétition. Cela ne veut pas dire que Forget accepte une infériorité à vie : « Je suis moins fort aujourd’hui mais cela ne signifie pas que demain je n’aurai pas ma chance ». Les progrès et l’intelligence permettent d’espérer inverser les rapports de force.
La compétition est un moyen d’accéder à la reconnaissance de l’altérité. Ici, on sent que Guy Forget est marqué par cette prise de conscience des qualités de joueur de Boris Becker. « Je ne pouvais rien. Tu es vraiment un très grand joueur ». Cette reconnaissance de l’être ne tue pas la conscience qu’il a de lui-même. Donner le meilleur de soi-même est une façon d’accéder à sa propre reconnaissance. « Au cours du match, ton jeu m’a permis d’aller au bout de moi-même, d’exprimer de nouvelles capacités et de donner le meilleur de moi-même même si j’ai perdu ».
Il y a ici une co-naissance, une naissance à soi-même et à autrui. Par la compétition, j’accède à une connaissance de moi-même et d’autrui. On considère trop le terme de la compétition comme une alternative ontologique entre les deux protagonistes. Si tu es, je ne suis pas ; si je suis, tu n’es pas. Seules la défaite et la victoire déterminent ces sentiments. Ces grands champions nous montrent que la compétition peut servir la promotion de tous les protagonistes quelque soit le résultat. La compétition perd son sens animal et accède ici à un sens humain.